
« Nous doublons le congé paternité » a déclaré le Président de la République, dans une phrase qui sonne drôlement bien pour la plupart des français.
Pour moi comme pour une partie du collectif de père engagé, il y a comme un sentiment de vide et d’accomplissement. Un soulagement et une déception. Après trois ans de militantisme, cette annonce du doublement du congé paternité en France sonne comme une victoire amère.
Mais une victoire quand même! Allez, dans petite avancée, il y avancée. Célébrons sans faire la fine bouche. Chantons en coeur : oui, la France progresse! Retenons que le congé paternité passe de 14 à 28 jours et répond à une attente sociétale portée par la nouvelle génération de pères souhaitant davantage d’égalité, d’implication dans l’éducation des enfants. Une étude menée par notre collectif de pères vient de récolter 441 témoignages sur le congé paternité en ce sens.
Retenons que cette évolution, à défaut d’être une révolution, est prise dans un contexte Covid peu favorable. Retenons que le sujet a été porté. « Le biberon est à moitié plein mais au moins on a parlé du biberon » me rappelle un ami. Le gouvernement a mis fin à 18 ans d’inaction depuis sa mise en place en 2002 par Ségolène Royal. C’est un premier pas évident que je souligne lors de mon intervention à la matinale d’Europe 1.
De là à féliciter le gouvernement… , il y a là aussi un pas évident. Trois ans après avoir annoncé « vouloir mettre en place un congé paternité pour aider le père ou le second parent à accompagner la mère » (Emmanuel Macron, le 24 février 2017 – RMC) le gouvernement ne mettra en place la loi que dans un an. On patientera donc la quasi fin du quinquennat. On a attendu 18 ans, on peut en attendre 19?
Surtout, à titre plus personnel, la proposition de loi est loin de celle qui a motivé mon engagement. Trois ans de militantisme voient pour moi naître une reforme loin du standard pour la France en termes d’égalité F/H. Car finalement, le gouvernement place le père en soutien de la mère pendant la période qui suit la naissance de l’enfant. Il n’esquisse pas l’ambition d’une réforme égalitaire avec un impact sur le marché du travail et sur la répartition des tâches à la maison en s’inspirant du modéle parental alterné scandinave. Il est loin du compte. A titre d’illustration, un mois de congé paternité était offert en Norvège en 1994, la Suède en 1978.
L’annonce m’a fait replonger dans mes débuts, en 2017, l’année de naissance de ma fille à Oslo qui m’avait fait découvrir le modèle norvégien du congé parental alterné. J’avais alors spontanément interpelé le gouvernement, l’appelant à s’inspirer du modéle nordique dans sa future réforme du congé parental. En reparcourant la vidéo, je ne changerai rien à mon propos. Peut’etre que j’enlèverai les lunettes de soleil.
En plus de ce blog pour promouvoir le modéle nordique, il y a eu également eu un livre, des quinzaines d’articles et d’interviews, podcast, radio et télé une rencontre avec Adrien Taquet. Ce travail n’a pas suffi à faire adopter le modèle scandinave malgré l’inclinaison positive du ministre.
D’un engagement trop individuel et isolé, j’ai petit à petit découvert beaucoup de pères engagés dans toute la France. Des pères qui n’hésitent pas à combattre les idées recues, à revendiquer leur nouveau rôle de père et à déplacer les montagnes pour faire évoluer les mentalités. Des pères avec lesquels nous avons écrit des tribunes pour faire évoluer les décideurs politiques.
Je reste persuadé que nous avons parvenu à influencer le gouvernement.
Et qu’il faut en rester fier.
Et qu’il faut suivre les prochains débats. Restons ensemble attentifs aux modalités d’application et d’indemnisation. Le ministre Adrien Taquet nous confiait travailler sur une réforme plus globale. La victoire pourrait avoir meilleur goût si le congé paternité était assaisonné d’un congé parental mieux rémunéré. Ce qui laisserait du temps à tous les pères de lire « La barbe et le biberon ». Pendant la sieste de leur bébé,

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